Rappel sur le Mediator® : soyons toujours plus pharmacovigilants !
Le benfluorex (Médiator®) a été mis sur le marché en 1976 et prescrit pendant plus de 30 ans dans deux indications : les hypertriglycéridémies et le diabète de type 2 chez les patients en surcharge pondérale.
Quand le service médical rendu (SMR) de ce médicament a été évalué dans ses deux indications, il s’est révélé insuffisant. Le benfluorex (Médiator®), la dexfenfluramine (Isoméride®) et la fenfluramine (Pondéral®), qui présentent une parenté structurale, agissent par l’intermédiaire d’un métabolite actif de structure amphétaminique aux propriétés anorexigènes : la norfenfluramine. Cette dernière est responsable de valvulopathies et d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Le benfluorex a été présenté comme un antidiabétique afin de faciliter l’obtention de l’AMM.
Au cours des années 1990, un lien a été établi entre la prise d’Isoméride® et des cas d’hypertension artérielle pulmonaire, conduisant au retrait de l’Isoméride® et du Pondéral® en 1997 alors que le Médiator® conservait son AMM.
A partir de 1999, plusieurs cas de valvulopathies et d’HTAP en lien avec le benfluorex furent rapportés, les mises en garde se multiplièrent (médecins-conseils de la sécurité sociale, praticiens hospitaliers, centre de pharmacovigilance de Toulouse, revue Prescrire) et en 2009 Irène Frachon dénonça publiquement le scandale sanitaire. Il fallut attendre novembre 2009, soit plus de 30 ans après sa mise sur le marché et 10 ans après les premières alertes de pharmacovigilance, pour que l’AMM du Médiator® soit retirée en France. Plusieurs pays européens l’avaient retirée depuis plusieurs années : la Suisse en 1997, l’Espagne en 2003, l’Italie en 2004. La Belgique avait quant à elle toujours refusé d’accorder l’AMM à ce produit jugé inefficace. Plus du tiers des prescriptions se faisaient en France hors AMM pour ses effets anorexigènes, le Médiator® ayant pris le relais de l’Isoméride® comme coupe-faim.
Au moment de la commercialisation d’un médicament, l’évaluation du rapport bénéfice/risque repose sur une expérience limitée, acquise dans le cadre des essais cliniques. Le suivi des effets secondaires après la mise sur le marché (« dans la vraie vie »), durant une phase de développement qui s’étend parfois sur plusieurs décennies, peut révéler un rapport bénéfice/risque beaucoup moins favorable que le rapport initial.
Il ne sera jamais assez répété que le rapport bénéfice/risque d’un médicament n’est pas fixé une fois pour toutes. Il doit être réévalué à intervalles réguliers en tenant compte notamment des effets indésirables parfois graves déclarés au réseau de pharmacovigilance. Et dans l’attente du retrait de l’AMM, il faut savoir déprescrire certains médicaments !