L’hydroxychloroquine : un médicament à prescription hospitalière ?
Le sulfate d’hydroxy-chloroquine (Plaquenil®), est un médicament au profil de sécurité bien établi disposant d’une AMM pour le paludisme, la polyarthrite rhumatoïde et le lupus. Des études in vitro et des études cliniques ont montré l’efficacité de cette molécule dans le traitement du COVID-19. Le Professeur Didier Raoult, de l’Institut Méditerranée Infection de Marseille, expert incontestable en virologie, recommande l’utilisation d’une association hydroxy-chloroquine/azithromycine dès les premiers signes de gravité respiratoires dans le contexte actuel de débordement imminent de nos hôpitaux et de nos services de réanimation. Le Professeur Christian Perronne, chef du service infectiologie de l’hôpital Raymond Poincaré, soutient cette stratégie thérapeutique. Pour ces experts, il n’est pas raisonnable d’attendre les résultats de l’essai européen Discovery, visant à étudier l’efficacité de quatre traitements (remdésivir, lopinavir-ritonavir, interféron bêta, hydroxychloroquine), pour utiliser l’association hydroxy-chloroquine/azithromycine dans les cas qui viennent d’être définis. Notons que cet essai bien tardif aurait dû être mené dès le mois de janvier dernier, nous aurions ainsi les résultats aujourd’hui. Deux points doivent être éclaircis concernant la prescription d’hydroxychloroquine :
Premier point : l’hydroxy-chloroquine a été classée sur la liste II des substances vénéneuses par un arrêté du 13 janvier 2020. Cet arrêté du directeur général de la santé, Jérôme Salomon, par délégation pour Agnès Buzyn, a été pris sur proposition du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) au nom du principe de précaution pour un risque génotoxique mal évalué. Les médicaments inscrits sur la Liste II sont des médicaments soumis à prescription médicale et qui ne peuvent donc être obtenus que sur présentation d’une ordonnance. Le problème n’est pas tant le classement en Liste II de l’hydroxy-chloroquine que le problème suivant : pourquoi même sur présentation d’une ordonnance l’hydroxy-chloroquine est depuis plusieurs semaines inaccessible dans les officines de notre pays ?
Deuxième point : le 23 mars Olivier Véran, ministre de la santé, a annoncé un arrêté encadrant la prescription Hors AMM de l’hydroxy-chloroquine qui n’est désormais accessible qu’aux équipes hospitalières pour le traitement des patients hospitalisés souffrant de formes sévères de COVID-19. En pleine épidémie de Covid-19, l’hydroxy-chloroquine est donc passée d’abord en Liste II puis de facto en médicament à prescription hospitalière. Un médecin généraliste n’a pas la possibilité de prescrire ce médicament à un patient qui présente à domicile les premiers signes de sévérité respiratoires du COVID-19. Il ne s’agit absolument pas bien entendu de préconiser l’usage généralisé de l’hydroxy-chloroquine chez les 80% de patients qui présentent une forme bénigne de la maladie, mais de pouvoir la prescrire précocement aux patients qui présentent les premiers signes de gravité, notamment à ceux qui ne pourront pas être hospitalisés dans des structures de soins adaptées (nos expatriés entre autres). Or les données cliniques fournies par le Professeur Didier Raoult suggèrent fortement que l’hydroxy-chloroquine est efficace si elle est administrée précocement, dès les premiers signes de gravité respiratoires. Une fois que le patient est hospitalisé en soins intensifs avec des signes de détresse respiratoire, les bénéfices du traitement ne semblent pas établis.
Pour justifier l’absence de délivrance Hors-AMM (sur présentation d’une ordonnance) d’hydroxy-chloroquine, les autorités avancent le prétexte d’une pénurie possible de ce médicament pour « ceux qui en ont vraiment besoin », à savoir les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde et de lupus. Mais si nous sommes vraiment en guerre, à en croire les discours churchilliens de nos autorités, il faut leur objecter que la prescription précoce d’hydroxy-chloroquine pourrait éviter à des milliers ou des dizaines de milliers de patients l’admission en service de soins intensifs dans des hôpitaux surchargés et débordés. Ecoutons les vrais experts comme le Professeur Didier Raoult et le Professeur Christian Perronne et non des pseudo-experts qui passent plus de temps sur les plateaux de télévision qu’à soigner des malades.