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  • il y a 2 ans

Coronavirus et risque biologique

La nouvelle souche de coronavirus SARS-Cov-2, apparue au mois de décembre 2019 dans la ville de Wuhan en Chine, est responsable d’une infection respiratoire nommée Covid-19. Les réservoirs et les hôtes intermédiaires animaux des coronavirus font l’objet de nombreuses spéculations. Ces virus à ARN sont connus pour avoir provoqué dans le passé deux syndromes respiratoires sévères : le SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) et le MERS (Middle East Respiratory Syndrome). Depuis le mois de janvier, le SARS-Cov-2 s’est répandu dans près de 70 pays, notamment en Corée du Sud et en Iran. Le pays européen le plus touché est actuellement l’Italie.

 

L’évaluation du risque est difficile durant la phase initiale de propagation, compte tenu des incertitudes sur les caractéristiques épidémiologiques et cliniques de l’infection virale. Les données épidémiologiques concernent notamment la contagiosité et la létalité. La contamination se fait essentiellement par des projections (toux, éternuement) lors de contact rapproché face à face inférieur à 1 mètre et par contact avec les mains. L’indice de contagiosité (nombre de personnes contaminées par un malade) du SARS-Cov-2 est compris entre 2 et 3.  A titre de comparaison, cet indice est de 1.3 pour le virus de la grippe hivernale et de 12 pour le virus de la rougeole. La létalité moyenne (nombre de morts par rapport à la population infectée) du SARS-Cov-2 est de l’ordre de 3%, si l’on ne compte que les cas confirmés par la mise en évidence de l’ARN viral sur les prélèvements. Elle peut atteindre près de 15% chez les patients âgés de plus de 80 ans. A titre de comparaison, la létalité du SRAS est de 10% et celle du MERS de 35%. La létalité de la grippe saisonnière est de 0.2 à 0.5%. La survenue de mutations, fréquentes chez les virus à ARN, peut diminuer ou au contraire augmenter la contagiosité et la virulence. A ce jour le SARS-Cov-2 ne semble pas avoir subi de mutation modifiant de façon significative sa contagiosité et sa létalité.  

 

Les données cliniques concernent la période d’incubation et les symptômes évocateurs. La période d’incubation (intervalle entre la contamination et les premiers symptômes) peut durer 14 jours selon l’OMS, ce qui justifie la mise en « quatorzaine » des personnes susceptibles d’avoir été contaminées. La possibilité de transmission par des patients asymptomatiques (plusieurs heures avant le début des symptômes) ou des porteurs sains est redoutée, de même que la transmission par des « super-contaminateurs ». L’infection par le SARS-Cov-2 est confirmée en quelques heures par un test diagnostique de type PCR mettant en évidence l’ARN viral dans le prélèvement (nez, gorge). Dans 80% des cas l’infection respiratoire est bénigne, se présentant sous la forme d’un simple rhume et pouvant même passer inaperçue. Un syndrome grippal associant fièvre et toux doit faire évoquer le diagnostic dans le contexte actuel. Près de 5% des cas peuvent évoluer vers une forme grave avec syndrome respiratoire sévère nécessitant une admission en soins intensifs.

 

La France est actuellement au stade 2 de la propagation du virus, caractérisé par l’apparition de plusieurs groupements de cas ou ''clusters''. Dans la majorité des clusters, le patient 0 et la chaine de transmission ont été identifiés. Il existe cependant des cas sans exposition avérée et sans lien épidémiologique clair tel qu’un antécédent de voyage dans une zone à risque ou un contact avec un cas confirmé. A ce stade, les mesures « barrières » visent à limiter la propagation du virus, notamment lors de la prise en charge de « cas possibles » et de « cas confirmés » par les professionnels de santé.  L’information du public sur la façon de se protéger et de protéger les autres, notamment les personnes fragiles (personnes âgées, malades chroniques, personnes immunodéficientes…), est essentielle et justifie probablement l’emballement médiatique. Une information claire permet de limiter la propagation du virus mais également la propagation de rumeurs. Toute personne présentant des symptômes évocateurs est invitée à ne pas se rendre aux urgences ni dans un cabinet médical mais appeler le SAMU-Centre 15. Le SAMU organise la prise en charge des patients et leur admission dans les hôpitaux référents. Les masques chirurgicaux ou masques anti-projections doivent être portés par les malades et les professionnels de santé leur prodiguant des soins.  Les précautions renforcées « air » et « contact » (masque de type FFP2, lunettes de protection, gants, combinaison) concernent les personnels hospitaliers au contact de formes sévères de la maladie ou effectuant des soins à risque accru de contamination comme une intubation trachéale. Le traitement du Covid-19 est essentiellement symptomatique. Plusieurs traitements ont démontré une efficacité in vitro, notamment la chloroquine et le remdesivir, mais ces résultats doivent être confirmés par des études cliniques rigoureuses. La production d’un vaccin n’est pas attendue avant un an. Le passage au stade 3 correspond à la phase épidémique avec circulation virale active sur tout le territoire. Dans ce cas, le schéma d’organisation des soins, notamment l’articulation ville/hôpital, doit être adapté.   Le suivi à domicile des formes bénignes est alors une mesure essentielle pour soulager le SAMU-Centre 15 et les hôpitaux. 

 

L’épidémie de Covid-19 impose une réflexion approfondie sur la préparation sanitaire au risque de propagation d’un agent pathogène viral, connu ou émergent. Cette propagation peut être naturelle, accidentelle ou criminelle. La dispersion accidentelle d’un agent pathogène viral depuis un laboratoire P4 (« Pathogène classe 4 ») ou BSL4 (« Biosafety Level 4 ») doit également être envisagée. Ces laboratoires dits de haute sécurité manipulent des micro-organismes hautement pathogènes (Catégorie A), tels que les virus de la variole et des fièvres hémorragiques. Dans certains pays, des laboratoires P4 mènent des recherches sur la militarisation d’agents pathogènes au moyen des techniques de génie génétique. Enfin la dispersion intentionnelle et criminelle de micro-organismes pathogènes à des fins terroristes (bioterrorisme) ne doit pas être écartée. Des plans de prise en charge d’un risque biologique connu ou émergent ont été définis dans ce cadre (Plans « PIRATE-NRBC » et « BIOTOX », Dispositif « ORSAN BIO ») et doivent être connus des professionnels de santé.

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